En France, de nombreux patients découvrent avec surprise qu’il est impossible de réaliser plusieurs IRM le même jour, même si elles sont toutes prescrites par leur médecin sur une seule ordonnance. Cette situation entraîne des délais plus longs, des coûts supplémentaires et une incompréhension générale face à des règles de facturation peu lisibles.
Quand 2 IRM sont prescrites sur la même ordonnance
Il n’est pas rare qu’un médecin demande 2 examens d’imagerie par résonance magnétique (IRM) pour un même patient : par exemple une IRM des segments lombaires et une IRM des sacro-iliaques. Logiquement, le patient s’attend à passer les 2 examens en une seule séance, afin de gagner du temps et d’éviter des déplacements inutiles. Mais en pratique, beaucoup de centres d’imagerie refusent cette organisation.
La raison est simple : en matière de tarification, la règle est stricte. Un radiologue ne peut pas facturer plus d’un acte d’IRM par patient et par jour. Résultat, les centres proposent deux rendez-vous distincts, ce qui rallonge la liste d’attente et augmente la charge financière pour l’assuré.
La facturation des IRM : une règle rigide et ses contournements
L’Assurance maladie confirme qu’elle connaît ces pratiques et qu’elles posent problème. Normalement, lorsqu’un deuxième acte médical est réalisé le même jour, il doit être facturé à moitié prix, avec une décote de 50 %. Mais l’IRM fait exception : aucune réduction n’est prévue. Le texte réglementaire est clair : pour les actes de remnographie, lorsqu’un examen porte sur plusieurs régions anatomiques, un seul acte doit être tarifé.
Face à cette contrainte, certains centres cherchent à contourner la règle. 2 méthodes sont repérées par l’Assurance maladie : la facturation en 2 temps (découper artificiellement la séance pour déclarer deux actes distincts) ou le rappel du patient à deux dates différentes. Dans les deux cas, le patient est pénalisé : perte de temps, coûts supplémentaires, et délais de diagnostic rallongés.
Une astuce possible : regrouper certains segments dans un seul acte
Tout n’est pas figé. Dans la nomenclature officielle, certains actes d’IRM couvrent déjà plusieurs zones du corps. C’est le cas, par exemple, pour l’IRM de la colonne vertébrale, qui inclut plusieurs segments, ou encore pour l’IRM du genou, qu’elle soit unilatérale ou bilatérale. Dans ces situations, un seul acte suffit, et il peut englober plusieurs segments.
Mais dans la pratique, beaucoup de centres préfèrent programmer 2 examens distincts. Cette solution est plus rémunératrice pour l’établissement, mais rarement justifiée sur le plan médical, souligne le professeur Alain Luciani, de la Société française de radiologie (SFR).
L’Assurance maladie met en avant la pertinence des soins
L’Assurance maladie affirme vouloir prioriser la pertinence des soins. Elle rappelle que le radiologue est en droit de modifier la demande initiale du médecin si la nomenclature le permet. En théorie, cela devrait simplifier les choses. Mais dans la réalité, le patient ne rencontre le radiologue qu’au moment de l’examen et n’a pas connaissance des subtilités administratives. Tout ce qu’il constate, c’est qu’on lui impose deux rendez-vous, avec à la clé plus de temps perdu et plus de frais.
Face aux abus, l’Assurance maladie annonce le lancement d’une campagne nationale de contrôle des cabinets de radiologie d’ici fin 2025. De son côté, la SFR plaide pour la création d’un acte d’IRM « corps entier » destiné notamment au suivi de certains cancers. Cet acte global permettrait de mieux rémunérer le temps machine tout en allégeant les démarches pour les patients.
Un système à réformer pour éviter les gaspillages
Cette situation met en lumière un paradoxe bien connu du système de santé français. Officiellement, il s’agit de limiter les dépenses et de mieux encadrer les actes remboursés. Mais dans les faits, la règle actuelle entraîne une multiplication artificielle des rendez-vous, un allongement des listes d’attente et une perte de temps pour tous.
Les patients, comme Mélanie qui a témoigné de son parcours, refusent de subir ce gaspillage. Elle a dû contacter plusieurs centres avant d’en trouver un acceptant de regrouper ses examens en un seul rendez-vous. C’est révélateur d’un système rigide, où la logique comptable prime parfois sur l’intérêt médical et le confort du patient.
Ce que dit la loi
La réglementation est sans ambiguïté. Selon la décision de l’Union nationale des caisses d’assurance maladie du 18 juillet 2005, reprise dans le Livre III-Art III-B alinéa 4 : « Pour les actes de remnographie, lorsque l’examen porte sur plusieurs régions anatomiques, un seul acte doit être tarifé. »
Autrement dit, un radiologue ne peut pas facturer deux IRM distinctes le même jour pour un même patient. Cette règle, conçue pour éviter les abus, a paradoxalement engendré un système peu efficace et pénalisant pour les assurés.
Ce blocage administratif illustre une fois de plus la rigidité de la Sécurité sociale française : au lieu de fluidifier l’accès aux soins, elle enferme patients et médecins dans une logique de facturation qui retarde les diagnostics et alourdit les coûts. Une réforme de la nomenclature des actes d’imagerie serait nécessaire pour concilier pertinence médicale, rémunération juste des professionnels, et respect du temps des patients.