L’asexualité progresse-t-elle chez les jeunes ?

L’asexualité chez les jeunes est un phénomène qui semble prendre de l’ampleur, bien que le concept en lui-même ne soit pas nouveau. Loin d’être une simple absence de libido ou un désintérêt temporaire pour la sexualité, l’asexualité est aujourd’hui revendiquée comme une véritable orientation sexuelle par de plus en plus de jeunes. Ce qui est frappant, c’est la manière dont cette orientation est non seulement assumée, mais également défendue face à une société qui continue de valoriser une sexualité omniprésente et souvent hypersexualisée.

De nombreuses jeunes femmes, par exemple, affirment ne ressentir aucun attrait pour le sexe. Pour elles, l’asexualité n’est ni un manque, ni une anomalie, mais un état de fait avec lequel elles vivent très bien. leurs parents et grand-parents, représentatifs d’une autre époque, ont du mal à concevoir cette réalité, la réduisant à une absence de libido ou, pire encore, à une pathologie.

Selon un sondage Ifop réalisé en 2024, 12 % des jeunes Français âgés de 18 à 24 ans se considèrent asexuels. Il est aussi intéressant de noter que plus d’un quart de ces jeunes n’ont eu aucun rapport sexuel au cours de l’année écoulée, une statistique qui a été multipliée par cinq depuis 2006.

Loin d’être un simple rejet de la sexualité, l’asexualité s’affirme comme une réponse à une société saturée par le sexe. Après des décennies de promotion d’une sexualité exacerbée, que ce soit dans la publicité, la mode, ou même la culture populaire, une nouvelle génération semble se tourner vers plus de sobriété, cherchant une forme de sincérité et d’authenticité qui n’est pas nécessairement liée à l’acte sexuel. Certains voient dans cette tendance une recherche du « moins », un mouvement qui prône le « less is more » dans tous les aspects de la vie, y compris la sexualité.

Pourtant, cette revendication de l’asexualité n’est pas exempte de critiques. Des experts posent la question de savoir si ces jeunes ont vraiment exploré toutes les formes de sexualité avant de se déclarer asexuels. Elle suggère que certains jeunes rejettent simplement les formes classiques de sexualité, comme la pénétration, qu’ils associent à une norme masculine dépassée. En ce sens, l’asexualité pourrait aussi être vue comme une forme de déconstruction des normes établies, plutôt qu’une absence totale de désir.

En effet, la banalisation des sex-toys, par exemple, montre bien que l’absence de relations sexuelles classiques ne signifie pas l’absence de sexualité. Jean-Philippe de Tonnac, auteur de « La Révolution asexuelle », va plus loin en affirmant que notre société se dirige vers une forme d’onanisme généralisé, où le désir pour l’autre est remplacé par la satisfaction personnelle, souvent alimentée par les fantasmes individuels et les rencontres virtuelles. Ce constat d’une société en pleine transformation ne doit pas pour autant nous faire perdre de vue que l’asexualité, pour ceux qui la vivent, est bien plus qu’une simple tendance ou une mode passagère.

Une figure emblématique de cette communauté « A », insiste sur le fait que l’asexualité n’est pas incompatible avec le fait d’avoir un partenaire. Beaucoup d’asexuels vivent en couple, et développent une forme de sensualité qui ne passe pas forcément par l’acte sexuel. Pour eux, l’amour et la tendresse suffisent amplement, et ils n’éprouvent ni la nécessité ni l’envie de se conformer aux attentes sexuelles de leur partenaire. Cette conception de la relation, basée sur un respect mutuel et une absence de pression sexuelle, pourrait bien être la clé d’un nouveau type de relation amoureuse, où la tendresse et le respect des limites de chacun prennent le pas sur la satisfaction des désirs charnels.

En définitive, l’asexualité chez les jeunes peut être vue comme une réponse à une société qui a longtemps survalorisé la sexualité. Elle ouvre la voie à une redéfinition de l’intimité et du désir, où l’individu est libre de choisir son propre chemin sans se sentir contraint par les normes ou les attentes sociales. Pour ceux qui veulent comprendre ce phénomène, il est essentiel de dépasser les préjugés et d’accepter que la sexualité, tout comme l’absence de sexualité, est une affaire personnelle, à respecter et à protéger.

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